20 janv. 2021

Développer des nouveaux services sur abonnement

Développer des nouveaux services sur abonnement

Les contenus d’information ne sont pas forcément le seul « produit » que les médias peuvent vendre à leurs lecteurs.



Pourquoi c’est important

Face à la chute des revenus publicitaires, la quasi-totalité des médias cherche à développer les revenus issus des lecteurs — le fameux « reader revenue ». Les stratégies s’affûtent afin d’engager les lecteurs, les faire venir plus longtemps et plus fréquemment, et bien souvent leur vendre un abonnement in fine.

Mais les contenus d’information ne sont pas forcément le seul « produit » que les médias peuvent vendre. Pour faire rester les lecteurs sur leurs plateformes, de plus en plus d’éditeurs développent des services ou des contenus complémentaires avec leur offre éditoriale principale.

Ce n’est pas une tendance très nouvelle : les journaux papier ont toujours été composés de rubriques plus légères, de jeux, de recettes de cuisine, de programmes TV… Le tout formait ce que les anglo-saxons appellent un « bundle », un assemblage de contenus très divers, conçu pour plaire à un grand nombre de lecteurs. Une logique que la révolution numérique a eu tendance à affaiblir pendant un temps : des sites web ultra-spécialistes existent désormais sur tous les sujets, rendant la compétition plus difficile pour les médias généralistes.

En revanche, dès les débuts du web, les grands éditeurs nous ont habitué à d’autres types de services, de qualité variable. Conjugueurs, codes promo, guides d’achat : autant de services gadgets dont l’intérêt principal était surtout de grimper en visibilité sur les moteurs de recherche, de gonfler les statistiques d’audience et de monétiser le tout via la publicité. Des services bas-de-gamme, donc, qui sont par ailleurs un véritable scandale au regard de la certification des audiences web (mais c’est un autre sujet…)

Aujourd’hui, l’heure est à la montée en gamme. Les services annexes sont désormais perçus comme un nouveau levier de fidélisation et de monétisation. Il n’a pas échappé aux éditeurs que le business de l’abonnement est en plein boom, et pas seulement dans les médias ! Tout semble aujourd’hui pouvoir se transformer en abonnement, à condition de cibler les bonnes communautés et de soigner sa proposition de valeur.

Certains services payants peuvent ainsi trouver le succès avec une offre d’abonnement sur-mesure. D’autres éditeurs les intègrent plutôt à leurs offres principales, mais souvent dans une logique d’« upsell » consistant à stratifier les offres pour pousser les lecteurs à payer plus cher.

On assiste ainsi à la renaissance du bon vieux « bundle » de la presse écrite. L’information reste le coeur de métier et l’argument principal pour faire payer les lecteurs, mais certains d’entre eux peuvent aussi être appâtés par des divertissements ou des services bien fichus. Et puisque tout le monde n’a pas les moyens de cumuler 10 abonnements, il est toujours bon que le client ait le sentiment d’en avoir pour son argent.

L’enjeu est donc de trouver le bon filon : identifier un créneau stratégique, en affinité avec son audience cible, sur lequel on peut apporter une plus-value. Encore mieux : des synergies éditoriales peuvent être imaginées pour recycler et donner une seconde vie à certains contenus.

Les pistes

Les jeux

Les mots-croisés du New York Times connaissent un succès assez phénoménal en version numérique : plus de 400 000 abonnés propres (hors abonnements classiques) et une application extrêmement bien notée. L’offre a été étoffée progressivement avec des jeux supplémentaires et une stratégie d’acquisition maline (la version « Mini » pour les débutants est gratuite). La communauté fait l’objet d’une animation sur les réseaux sociaux, avec même des sessions live vidéo.

De nombreux médias à travers le monde tentent de répliquer le modèle : du Monde au Times londonien, en passant par Le Figaro ou encore une éphémère tentative chez Libération. Pas facile de promouvoir et d’animer correctement un tel produit…

Les recettes de cuisine

Depuis quelques années, le New York Times valorise aussi son énorme catalogue de recettes — issu de décennies de journaux papier — avec un site entièrement pensé pour les amateurs de cuisine. Doté d’une interface simple et pratique, il touche désormais une communauté fidèle (les commentaires sont d’ailleurs devenus un repère de drôlerie).

Côté monétisation, le site a d’abord été en lancé en gratuit, avant de basculer sur une offre d’abonnement dédiée, qui s’ajoute donc à l’abonnement classique au journal. Un modèle qui rappelle largement la stratégie des mots-croisés. Pas étonnant que d’autres médias food, comme Bon Appétit du groupe Condé Nast, tentent de s’aligner.

[Plus d’infos sur le modèle à succès de NYT Cooking dans cette bonne étude de cas]

L’horoscope

La branche américaine de Vice publie depuis 2015 une rubrique « Horoscope » très populaire. Pour fidéliser cette audience très jeune, le média a lancé une application mobile originale avec un modèle « freemium » ambitieux (abonnement à 5,99$ par mois). On y trouvait des chroniques quotidiennes, hebdomadaires, un peu de personnalisation et des outils habiles pour les afficionados d’astrologie (oui, on parle bien d’une grille de compatibilité astrale).

Après un départ prometteur, l’expérimentation a visiblement fait long feu. L’application a fermé depuis, sans doute éclipsée par l’application concurrente Co-star, qui connait une jolie hype.

La culture générale

L’application Mémorable du Monde propose un rendez-vous quotidien de culture générale, qui s’appuie intelligemment sur les archives du Monde. L’utilisateur reçoit des leçons variées et est incité régulièrement à réviser ses connaissances. Un positionnement original, à la croisée des applications éducatives, de développement personnel et d’information.

Le tout est évidemment payant sur abonnement (entre 5,99€ et 11,99€ par mois). Le Monde promeut également le dispositif de façon agressive auprès de ses abonnés existants. On pourra toutefois regretter une expérience utilisateur assez déceptive et en-deça de la plupart des applications d’apprentissage.

Le fitness

Le géant de la presse magazine Hearst a lancé en 2019 la plateforme All Out Studio, qui propose des vidéos payantes de fitness. Un investissement intéressant sur un marché en plein essor, qui permet au groupe de diversifier ses revenus sur un créneau affinitaire avec ses titres lifestyle (Men’s Health, Women’s Health, Cosmopolitan…) Le groupe ne lésine d’ailleurs pas sur la cross-promotion dans ses magazines.

Le développement professionnel

Le média-annuaire Welcome To The Jungle a développé la plateforme Welcome Originals, qui héberge des vidéos inspirationnelles et des challenges pour booster ses compétences professionnelles. Un concept dans la veine du service américain Masterclass ou encore de l’application française Majelan. Le tout est réservé aux abonnés payants, tandis que le média reste en accès libre.


D’autres bonnes idées sont sans doute à prendre pour diversifier les portefeuilles d’abonnement des éditeurs.

Si on creuse parmi les autres tendances lifestyle, le succès des applications de méditation et de relaxation (Calm, Petit Bambou) pourrait peut-être offrir quelques opportunités inattendues pour les médias. N’y aurait-il pas un créneau pour des contenus ou des services qui prendraient soin de la santé mentale des utilisateurs ? A méditer… 😇

Maxime Loisel
Maxime Loisel
Fondateur de HyperNews. Consultant indépendant en stratégie et design pour les médias en ligne. Ce blog n’engage que moi.
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